J’aime les musiciens et les peintres qui s’exposent dans les cafés et les restaurants, ceux qui ainsi « s’exposent à la critique ou à l’indifférence ».
Paradoxalement c’est dans ces lieux conviviaux qu’ils ont le plus de chance de convaincre et d’émouvoir. Pour moi l’œuvre ne peut être dissociée du contexte dans lequel elle est présentée. Le public n’a pas le même vécu quand il est dans une salle de concert ou dans un musée que quand il boit un verre dans un bar ou quand il dîne dans un restaurant ; sa disponibilité n’est pas la même, ses attentes sont différentes.
Des études comportementales ont montré l’influence du décor sur l’appréciation de la nourriture. Et c’est à ce moment que l’artiste se met en danger. Pas au point de le protéger en le séparant du public par un grillage (cf. la séquence « sweet home Chicago » dans le film « the blue’s brothers ».
Mais il a cette fantastique possibilité de séduire, de créer un instant magique que chacun aimerait voir se prolonger. Et cela est aussi valable pour la musique que pour la peinture. Il y a des tableaux qu’on découvre, qu’on souhaite s’approprier parce que le moment de sa découverte est convivial.
Alors merci à tous les bars, les restaurants qui organisent des concerts et des expos dans les conditions que l’on sait, taxes, impôts, sacem, etc...
La prohibition de l’alcool, aux Etats Unis dans les années 30 a permis le développement du Jazz grâce aux « speakeasy»
Un speakeasy était, aux États-Unis, un établissement de vente et de consommation de boissons alcoolisées pendant la Prohibition (entre 1920 et 1933, voire plus tard dans certains États), période au cours de laquelle la vente d'alcool était interdite. L'expression trouve son origine dans l'habitude qu'avaient les patrons de bar de demander à leurs clients de parler doucement (speak easy) lorsqu'ils demandaient de l'alcool, afin de ne pas éveiller les soupçons. Et ils gagnaient beaucoup d’argent, ce qui leur permettaient de bien payer les musiciens.
Des nos jours, les Américains ont créé sur le même modèle le mot « smokeeasy » (du verbe to smoke : fumer), qui désigne un recoin pour fumeurs dans les bars et boîtes de nuit où le tabac est interdit.
Alors, par association d’idées, la forme la plus basse de l’intelligence, et pour dire n’importe quoi, on peut rêver, avoir une vision optimiste des conséquences de la prohibition du tabac dans les lieux publics ; si la période de prohibition de l’alcool a contribué à l’essor du jazz, la prohibition du tabac permettra peut-être, je ne sais comment, aux musiciens et aux peintres de vivre de leur art.
Gilbert Haas